J’ai l’âge qu’avait ma mère autrefois à l’âge où je la trouvais très adulte pour être jeune encore. Aujourd’hui, je me sens jeune, j’aimerais que le monde me comprenne et me laisse profiter de l’enfant qui demeure en moi.
Ma mère à son âge avait peut-être ce même besoin, mais elle était déjà mère, la société avait cessé de l’appeler par son nom propre. On l’appelait par les différents noms de fonction qu’elle était censée occuper. C’est peut-être un privilège finalement d’être appelé par mon nom à l’âge où ma mère avait dû renoncer au sien.
La vie d’adulte est essentiellement une vie de lutte pour exister, une vie de renoncement pour appartenir, une vie de survie pour tenir dans les rangs, une vie où l’on ne se demande pas assez si l’on vit. Une vie des souvenirs pour rester dans la vie. Une vie de peur pour cette autre vie à venir.
Il y’a quelque chose de dramatique dans la vie d’adulte. Quelque chose comme une joie triste, un bonheur amer, une promesse trahie.
La beauté de l’enfance réside dans l’espoir de grandir et d’accomplir. Celle d’un adulte réside dans ce qu’il surmonte, dans le regard bienveillant de l’enfant qu’il fut, dans la gratitude de ce qui est.
Laissez-moi rire comme un enfant, laissez-moi rêver comme un enfant, laissez-moi ce qui me reste d’innocent. N’ayez aucune crainte, je saurai vivre et souffrir comme un adulte. L’adulte en moi, connait son âge, connait la souffrance, connait le prix de ses excès. Je paierai ma note. Un laissez-moi vivre est une phrase d’adulte, un adulte oppressé par le poids des exigences. Un adulte épuisé par le vertige. Un adulte pas tout à fait adulte.
Cette réflexion est ridicule, je sais. Je mets la photo de ma mère à côté de la mienne. Pour avoir encore l’air jeune. Pour ne jamais douter que je suis encore enfant. Pour me dire qu’un jour peut-être, j’aurais son âge, et qu’à son âge je voudrais peut-être que l’on comprenne que j’ai encore besoin de demeurer enfant sans renoncer à l’adulte que je suis devenue !
Écrit par Aliane UMUTONIWASE